« Notre première activité collective a pris la forme d’un récit, d’un exercice de mémoire. Elle nous a aussi permis de revisiter nos archives, activité qui est primordiale dans ma pratique depuis de nombreuses années. Pour nous, il était logique de mettre sur pied une archive vivante qui allait pouvoir croître et proliférer. Par un processus collaboratif de montage et d’agencement, des fragments de mémoire jusqu’alors ignorés ont pu être enregistrés et rassemblés en un espace partagé, ce qui a donné lieu à des trajectoires inédites et inattendues. Ce mode de travail collectif nous a permis d’examiner les frontières fluides qu’on trace entre le soi et l’autre, la mémoire et l’oubli, le réel et le fictif, la continuité et la fragmentation — le tout de façon créative. Paradoxalement, cette façon de travailler a aussi engendré un aplanissement de nos individualités d’artistes tout en les préservant. Maintenant, nous échangeons généreusement les uns avec les autres alors que nos apports individuels se font de plus en plus anonymes.
L’archive représente un terrain d’entente où il est possible d’actualiser de nouveaux passés, puis d’élucider et même d’invoquer de nouveaux futurs. Dans ce sens, Outre-vie est devenu un espace où il est possible de vivre ensemble par la création artistique. »
Extrait d’une entrevue de Gwynne Fulton avec Raymonde April pour la publication Outre-vie / Afterlife, Québec, VU, 2018, p.7